Femme enceinte préparant son accouchement
Points Clés

L’épisiotomie : tout ce que vous devez savoir pour faire un choix éclairé

Vous êtes enceinte ou vous venez de donner naissance, et une foule de questions sur l’accouchement envahissent votre esprit. Parmi elles, l’épisiotomie est probablement l’une des interventions les plus redoutées et les plus controversées. L’idée qu’une incision puisse être pratiquée au moment où vous donnez la vie peut sembler angoissante, voire effrayante. Mais au-delà de la peur, il est crucial de comprendre pourquoi cette pratique est réalisée, dans quels contextes elle est nécessaire, et surtout, comment vous pouvez vous préparer pour éviter qu’elle soit faite sans raison valable.

Cet article vous propose une plongée en profondeur dans le sujet, pour vous aider à prendre les meilleures décisions pour votre corps et votre bien-être.

Qu’est-ce que l’épisiotomie, et pourquoi en parle-t-on autant ?

L’épisiotomie, pour faire simple, est une incision chirurgicale pratiquée dans la région périnéale, entre le vagin et l’anus, pendant l’accouchement. Cette intervention a pour but d’élargir l’ouverture vaginale pour faciliter la sortie du bébé, notamment lorsque l’on craint une déchirure grave, ou en cas de souffrance fœtale nécessitant un accouchement rapide. C’est du moins la théorie. En pratique, cette procédure est de plus en plus contestée.

L’origine de l’épisiotomie et son usage généralisé

Historiquement, l’épisiotomie a été introduite au début du XXe siècle avec l’idée que cette coupe pourrait prévenir des déchirures graves et préserver le périnée des femmes. Elle est devenue une pratique courante dans de nombreux pays, atteignant parfois des taux d’utilisation astronomiques, avec près de 90% des accouchements en France dans les années 1980 par exemple. On croyait fermement que cette intervention protégeait les femmes des complications et permettait une récupération plus rapide. Mais cette croyance a commencé à être sérieusement remise en question à mesure que les données scientifiques s’accumulaient.

Pourquoi l’épisiotomie n’est pas toujours nécessaire

Vous vous demandez sûrement : si l’épisiotomie a été si largement pratiquée, pourquoi en débattre maintenant ? Les réponses se trouvent dans une meilleure compréhension des risques associés et une évolution des mentalités sur la manière d’accompagner les femmes pendant l’accouchement. C’est ce que nous allons évoquer ensemble dans la suite de cet article.

Les idées reçues et Risques

« Mieux vaut une petite coupure contrôlée qu’une grosse déchirure imprévue »

Cette idée, que l’épisiotomie prévient des déchirures graves, est encore très répandue. Elle repose sur l’hypothèse qu’une incision chirurgicale nette est plus facile à suturer et à cicatriser qu’une déchirure naturelle. Cependant, cette vision est trop simpliste et ne prend pas en compte la complexité du corps humain.

Les études montrent que les déchirures naturelles, même si elles peuvent sembler plus imprévisibles, ont souvent des bords irréguliers qui cicatrisent mieux que les incisions nettes d’une épisiotomie. De plus, ces déchirures se produisent généralement dans des zones où les tissus sont plus fins et plus souples, ce qui facilite leur guérison. En revanche, l’épisiotomie coupe à travers toutes les couches du périnée, y compris les muscles, ce qui peut entraîner des douleurs prolongées et des complications plus sérieuses.

Des risques souvent minimisés

L’épisiotomie, comme toute intervention chirurgicale, comporte des risques. Pourtant, ces risques sont souvent minimisés ou ignorés, que ce soit par manque d’information ou par habitude médicale. Les complications possibles incluent des infections, des douleurs chroniques, des saignements importants, et des troubles lors des rapports sexuels post-partum.

Infections et complications immédiates

Tout d’abord, il faut parler des infections. Comme toute incision chirurgicale, l’épisiotomie crée une plaie ouverte qui est susceptible de s’infecter. Les infections peuvent entraîner des douleurs supplémentaires, un retard dans la guérison, et parfois même la nécessité de traitements antibiotiques. De plus, les saignements peuvent être plus abondants qu’avec une déchirure naturelle, ce qui peut entraîner une anémie post-partum ou prolonger le séjour à l’hôpital.

Douleurs persistantes et cicatrisation

Les douleurs post-épisiotomie peuvent persister pendant des semaines, voire des mois après l’accouchement. La cicatrisation peut être longue et compliquée, surtout si l’incision a été large ou si des complications, comme des infections, surviennent. Certaines femmes signalent des douleurs lors des rapports sexuels plusieurs mois après l’accouchement, ce qui peut affecter leur intimité et leur bien-être émotionnel.

Troubles sexuels et impact psychologique

L’un des aspects les moins discutés mais tout aussi important de l’épisiotomie est son impact sur la vie sexuelle et psychologique des femmes. Après une épisiotomie, certaines femmes éprouvent des douleurs pendant les rapports sexuels, ce qui peut durer plusieurs mois ou même années. Cela peut entraîner une diminution du désir sexuel et des tensions dans le couple.

L’impact psychologique ne doit pas être sous-estimé non plus. Subir une épisiotomie sans y avoir été préparée, ou pire, sans consentement éclairé, peut être traumatisant. De nombreuses femmes rapportent un sentiment de perte de contrôle sur leur corps pendant l’accouchement, ce qui peut affecter leur confiance en elles-mêmes et leur sentiment de compétence en tant que mère.

Préparer son accouchement pour éviter l’épisiotomie

Heureusement, il existe des moyens de réduire le risque d’épisiotomie et d’accoucher de manière plus naturelle et respectueuse de votre corps. Voici quelques stratégies pour vous préparer.

Adoptez des positions d’accouchement favorables

La position dans laquelle vous accouchez peut jouer un rôle crucial dans la réduction du risque de déchirures ou de nécessité d’une épisiotomie. Les positions traditionnelles, comme être allongée sur le dos, sont souvent favorisées par le personnel médical pour des raisons de praticité, mais elles ne sont pas toujours les meilleures pour le corps de la femme.

Accroupie ou sur le côté : des positions à privilégier

Accoucher en position accroupie, à quatre pattes ou sur le côté, permet au bassin de s’ouvrir davantage, ce qui peut faciliter la sortie du bébé tout en réduisant la pression sur le périnée. Ces positions permettent également à la gravité de jouer un rôle, rendant l’accouchement plus fluide. Elles sont moins contraignantes pour le périnée et permettent aux muscles de mieux s’étirer, réduisant ainsi le risque de déchirures et d’épisiotomie.

Importance de bouger pendant le travail

Ne sous-estimez pas l’importance de rester mobile pendant le travail. Marcher, s’accroupir, ou simplement changer de position peut aider à mieux positionner le bébé et à préparer le corps pour un accouchement sans intervention. Plus vous êtes libre de bouger, plus vous pouvez écouter votre corps et adopter les positions qui vous semblent les plus naturelles.

Le massage périnéal : un allié précieux

Le massage périnéal est une technique de préparation physique du périnée qui peut contribuer à réduire le risque de déchirure et, par conséquent, de nécessité d’une épisiotomie. Ce massage consiste à étirer doucement les tissus périnéaux à partir de la 34e semaine de grossesse, afin de les rendre plus souples et plus élastiques.

Comment pratiquer le massage périnéal ?

Pour pratiquer le massage périnéal, il est recommandé d’utiliser une huile naturelle, comme l’huile d’amande douce. Vous pouvez le faire vous-même ou demander à votre partenaire de vous aider. Il suffit d’insérer un ou deux doigts dans le vagin et d’effectuer de légers mouvements de pression vers l’arrière, en direction du rectum, et vers les côtés. L’objectif est de détendre les muscles et d’habituer les tissus à l’étirement qu’ils subiront lors de l’accouchement.

Les bénéfices du massage périnéal

Le massage périnéal peut non seulement réduire le risque de déchirures, mais aussi vous aider à mieux comprendre et contrôler les sensations de votre corps pendant l’accouchement. Il permet de prendre conscience de la zone périnéale, de la préparer à l’effort qu’elle va fournir, et ainsi de réduire le risque de nécessiter une épisiotomie.

L’importance du consentement éclairé

Un autre aspect essentiel de la préparation à l’accouchement est la question du consentement éclairé. Vous avez le droit de comprendre chaque intervention proposée par le personnel médical, et de l’accepter ou de la refuser en toute connaissance de cause.

Vous avez le droit de dire non

L’épisiotomie ne devrait jamais être une intervention de routine. Pourtant, elle est encore pratiquée trop souvent sans que les femmes en aient été correctement informées, ou sans qu’on leur ait donné le choix. Avant votre accouchement, prenez le temps de discuter avec votre équipe médicale de vos souhaits concernant l’épisiotomie. Si vous ne souhaitez pas qu’elle soit pratiquée sans raison impérative, faites-le savoir clairement. Rappelez-vous que vous avez le droit de refuser une épisiotomie, sauf en cas d’urgence vitale pour vous ou votre bébé.

Communiquez avec votre équipe médicale

La communication est la clé pour éviter les interventions non désirées. Avant d’accoucher, discutez de toutes les options qui s’offrent à vous avec votre sage-femme ou votre obstétricien. Posez des questions sur les circonstances dans lesquelles une épisiotomie pourrait être nécessaire et demandez à être consultée avant toute décision.

Il peut également être utile de rédiger un plan de naissance dans lequel vous exprimez vos souhaits concernant l’accouchement, y compris votre préférence pour éviter l’épisiotomie. Ce document peut être partagé avec l’équipe médicale pour s’assurer que vos choix seront respectés dans la mesure du possible.

Quand l’épisiotomie est-elle nécessaire ?

Il est important de reconnaître que l’épisiotomie peut être nécessaire dans certains cas bien précis, et qu‘il ne s’agit pas de diaboliser cette pratique, mais plutôt de l’encadrer de manière stricte.

Les situations où l’épisiotomie peut être justifiée

Il existe des situations où l’épisiotomie peut sauver des vies ou prévenir des complications graves.

Cas d’urgence : quand l’épisiotomie est la meilleure option

Dans certaines situations, l’épisiotomie peut être justifiée et même nécessaire pour préserver la santé de la mère ou du bébé. Par exemple, si le bébé montre des signes de détresse fœtale (comme une diminution du rythme cardiaque), et que l’accouchement doit être accéléré pour éviter des dommages neurologiques, une épisiotomie peut permettre au bébé de naître plus rapidement.

De même, dans le cas d’un accouchement instrumentalisé, où des forceps ou une ventouse sont utilisés pour aider à l’extraction du bébé, l’épisiotomie peut être nécessaire pour prévenir des déchirures graves causées par ces instruments.

Accouchements compliqués : quand la nature a besoin d’un coup de pouce

Il y a aussi des situations où l’accouchement ne se déroule pas comme prévu. Par exemple, si le bébé est particulièrement grand, ou si la position de la tête rend la sortie difficile, une épisiotomie peut être utile pour faciliter le passage du bébé sans causer de déchirure grave.

Cependant, même dans ces cas, l’épisiotomie devrait être utilisée avec parcimonie et uniquement après avoir épuisé les autres options. Chaque situation est unique, et il est important de peser les risques et les bénéfices de manière éclairée.

Objections courantes

« Mais toutes les femmes déchirent » : Faux, toutes les déchirures ne nécessitent pas une épisiotomie

Une autre idée reçue est que toutes les femmes se déchirent pendant l’accouchement, et que l’épisiotomie est une solution pour contrôler cette déchirure. Cependant, les études montrent que ce n’est pas le cas. Toutes les femmes ne se déchirent pas, et parmi celles qui le font, la plupart des déchirures sont mineures et guérissent naturellement, sans nécessiter de points de suture.

Les déchirures naturelles se produisent généralement de manière plus superficielle et peuvent guérir plus facilement que les coupures d’une épisiotomie, qui traversent plusieurs couches de tissu, y compris les muscles. De plus, une déchirure naturelle se produit là où les tissus sont les plus faibles, ce qui réduit la douleur et facilite la cicatrisation.

« C’est plus facile pour le personnel médical » : Oui, mais à quel prix ?

Un autre argument souvent avancé en faveur de l’épisiotomie est qu’elle facilite le travail du personnel médical en accélérant l’accouchement. Cependant, ce raisonnement place la commodité du personnel au-dessus du bien-être de la patiente. L’accouchement est un processus naturel, et chaque femme mérite que son corps soit respecté et que ses choix soient pris en compte.

L’épisiotomie ne devrait jamais être pratiquée simplement parce qu’elle rend l’accouchement plus rapide ou plus facile pour le médecin ou la sage-femme. Le confort et la santé de la mère doivent toujours être la priorité, même si cela signifie que l’accouchement prend un peu plus de temps.

Conclusion

L’épisiotomie n’est pas un mal nécessaire. C’est une intervention qui, dans la majorité des cas, peut être évitée grâce à une bonne préparation et une communication ouverte avec votre équipe médicale. En vous informant sur les alternatives et en prenant des décisions éclairées, vous pouvez augmenter vos chances d’un accouchement naturel et respectueux de votre corps.

Votre corps est votre bien le plus précieux, et vous avez le droit de décider comment vous souhaitez accoucher. Prenez le temps de vous informer, de poser des questions, et de discuter de vos souhaits avec votre équipe médicale. Qu’avez-vous pensé de ces informations ? Avez-vous déjà vécu une épisiotomie ou avez-vous d’autres questions ? Dites-moi tout dans les commentaires, je suis là pour échanger avec vous !

Pour aller plus loin, n’hésitez pas à consulter cette excellente vidéo d’Anna Roy sur le même sujet :

Ressources complémentaires

Sources Scientifiques en Français

  1. Inserm – Épisiotomie : Recommandations et Pratiques
    • Une analyse des pratiques et des recommandations concernant l’épisiotomie en France, avec des données récentes et des recommandations pour réduire les taux d’épisiotomie.
  2. HAS (Haute Autorité de Santé) – Prise en charge du travail et de l’accouchement normal : Guide des pratiques cliniques
    • Un guide de la HAS qui présente les pratiques optimales pour la gestion du travail et de l’accouchement, incluant des recommandations sur l’épisiotomie.
  3. CNGOF (Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français) – Recommandations pour la pratique clinique
    • Le CNGOF propose des recommandations actualisées sur l’épisiotomie, avec une revue des études disponibles et des suggestions pour la pratique en France.

Ouvrages de Référence en Français

  1. « Le guide de la naissance respectée » de Marie-Hélène Lahaye
    • Un ouvrage complet qui aborde les différentes pratiques obstétricales, dont l’épisiotomie, en mettant en avant l’importance du respect des choix de la femme.
  2. « Accouchement, les femmes méritent mieux : Le livre noir de la maternité » de Martin Winckler
    • Un livre critique sur les pratiques médicales autour de l’accouchement, avec une section dédiée à l’épisiotomie et à la médicalisation excessive.
  3. « Les droits des femmes enceintes » de Nadia Daam
    • Ce livre explique les droits des femmes pendant la grossesse et l’accouchement, y compris le droit de refuser une épisiotomie.
Si vous avez aimé cet article, n'hésitez pas à le partager ! ;-)

5 commentaire

  1. Sandrine Piazza

    Pour moi qui travaille sur l’écoute du corps en sophrologie, je retiendrai de ton article 2 choses : 1) le consentement éclairé : je trouve inadmissible qu’on puisse pratiquer une quelconque intervention sur le corps d’une personne sans avoir obtenu au préalable son consentement (cela fut le cas pour moi). 2) la facilité pour le personnel médical : excepté en cas de force majeur, en quoi la facilité de l’intervention doit primer sur le respect d’autrui ? Heureusement les pratiques et les mentalités progressent mais le « corps objet » ne devrait plus être d’actualité. Merci pour cet article très précieux pour toutes les futures mamans.

    1. Merci beaucoup pour ce commentaire 🙂
      En effet, la notion de consentement dans le milieu médical périnatal est souvent très … mouvante. J’espère que ce type d’article permettra aux futures mamans d’être mieux informées et d’aider à faire bouger les lignes autour de ces sujets-là qui sont malheureusement encore trop souvent mis sous silence en dépit du traumatisme que cela peut provoquer (et qu’on planque sous des poncifs tels que « c’est normal, toutes les mamans passent par là »…)

  2. Merci de m’avoir éclairé déjà sur le mot épisiotomie et pour ton article. Comme tu l’expliques bien , on doit communiquer et donner le choix a la patiente !

    1. Merci pour ce commentaire et avec plaisir 🙂 En effet, la maternité donne parfois envie de se laisser porter par le système médical qui est très (trop?) présent. Mais ce sont ces mêmes mamans qui subissent les conséquences ensuite dans leur corps et leur vie, et je trouve important qu’elles puissent avoir le choix et être informées de ce qu’il se passe dans leur corps (parfois malgré elles…)

  3. Merci pour cet article sur l’épisiotomie. C’est un sujet qui mérite d’être mieux compris, et tes conseils et informations sont précieux pour toutes celles qui veulent être informées avant l’accouchement. J’ai vraiment apprécié la manière dont tu abordes le sujet sans tabou, avec des explications claires et rassurantes.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.