Dans le précédent article, j’ai partagé avec vous différentes réflexions sur ce que sont les conseils non sollicités, leur impact sur les relations et leurs enjeux.
Aujourd’hui, je vais recentrer cet article sur l’expérience des mamans en post-partum : avec la grossesse, c’est l’une des périodes où les conseils non sollicités sont les plus nombreux dans la vie d’une femme… A croire que quand elle devient maman, tout le monde devient soudain plus compétent qu’elle !
Je n’ai aucun mal à croire que la plupart des conseils sont donnés avec de bonnes intentions, mais cela ne les rend pas toujours plus facile à vivre, surtout dans cette phase très particulière où la femme est souvent vulnérable et manque de confiance en elle. Tous les changements auxquels elle doit faire face la submergent et la rende parfois plus fragile et plus perméable qu’elle ne le serait en temps normal. C’est pourquoi ce sujet est si important pour sa santé mentale.
Quel impact des conseils non sollicités pendant le post-partum ?
Nous l’avons brièvement évoqué dans le précédent article à titre général, mais il est important de souligner l’impact des conseils non sollicités spécifiquement sur une jeune maman en post-partum.
En plein dans sa matrescence, sa transition entre l’avant et l’après, la maman est en train de se faire chahuter entre les multiples changements de son corps et de son identité. La matrescence, c’est une brutale perte de repères, en même temps qu’une soudaine et intense responsabilité envers la vie d’un être humain totalement dépendant et vulnérable.
De nombreuses mamans, surtout avec leur premier enfant, se sentent dépassées par les événements, débordées par les multiples requêtes du personnel médical. Tout le monde semble vouloir se mêler de leur dire quoi faire, comment le faire, quand le faire. Elle peine à trouver son rythme, sa place, et surtout son lien avec son enfant.
Au milieu de tout ceci, il n’est pas rare que les proches et amis, parents ou non d’ailleurs, se mettent en devoir de leur apporter leurs propres conseils. Que ce soit pour partager une expérience, pour simplement papoter du nouveau sujet à la mode (le bébé!) ou pour simplement aider une personne à laquelle ils tiennent, beaucoup vont noyer la jeune mère sous un torrent de conseils plus ou moins avisés, voire contradictoires.
Le problème est multiple et dangereux. D’abord, la jeune mère peut se sentir jugée dans sa façon de s’occuper de son enfant. Un conseil non sollicité peut tout à fait être perçu comme un jugement déguisé (« tu n’es pas assez compétente », « tu t’y prends mal »). La confiance en elle d’une jeune mère est fragile et peut facilement être égratignée par ce genre de propos, aussi bienveillants soient-ils.
Ensuite, il se peut tout à fait que ces conseils, même s’ils sont bons (ce qui n’est pas forcément le cas), ne soient pas en accord avec ce que souhaitent les parents pour leur enfant. Les valeurs de chaque famille, de chaque couple sont différentes. De nombreux parents se trompent en croyant que leurs valeurs sont forcément celles de leurs enfants, et n’imaginent pas que leurs petits-enfants puissent être éduqués différemment. Ils n’imaginent pas toujours combien l’expérience de la maternité peut être différente d’une personne à l’autre, d’une époque à l’autre. Ils n’envisagent pas que leurs enfants puissent avoir des désirs qui ne correspondent pas aux valeurs dans lesquels ils ont été éduqués. Cela a été mon cas, car j’ai construit un système de valeur très différent de celui dans lequel j’ai grandi, et j’ai beaucoup de mal à le faire comprendre et accepter, malheureusement.
Dans cette situation, la jeune maman peut se sentir incomprise et seule face à ses proches. Le fait que ses besoins et ses souhaits ne soient pas pris en compte peut être une grande douleur et une grande déception pour elle. C’est d’autant plus vrai qu’elle est dans une phase où elle a plus que jamais besoin qu’on la soutienne et qu’on l’aide. Or vouloir imposer sa vision des choses sur une jeune mère qui tente de se construire de nouveaux repères qui lui conviennent, c’est extrêmement violent.
Tout ceci constituent autant de sources de stress qui vont jouer sur la santé mentale et physique de la jeune maman, et par conséquent aussi sur celle de l’enfant. Le post-partum est une période où l’on doit absolument réduire au maximum les sources de stress. C’est une période qui devrait être un cocon de bienveillance et de douceur dans lequel la nouvelle famille apprend à s’apprivoiser et à inventer ses propres règles. Soutenir les parents et leur apporter de l’aide est primordial, mais vouloir imposer un point de vue sans tenir compte de leurs désirs, c’est le contraire d’une aide bienveillante.
Comment gérer les conseils non sollicités malvenus pendant le post-partum?
La priorité, en tant que jeune maman, c’est de communiquer ouvertement et honnêtement avec son partenaire sur ses souhaits et ses besoins autour de la maternité et de l’enfant. Créer un environnement de confiance et de soutien mutuel dans le couple permet de faire front commun, d’être au clair sur les valeurs partagées, et de nourrir la confiance en soi de chacun.
Cette confiance en soi est l’élément clé pour pouvoir s’affirmer avec douceur mais fermeté lorsque nos besoins ou nos valeurs ne sont pas respectées. Il ne s’agit pas d’entrer en guerre contre ceux qui nous font des conseils non sollicités. Mieux vaut garder en tête que, la plupart du temps, ces personnes nous aiment sincèrement et ne nous veulent que du bien.
Il est donc préférable de commencer par communiquer simplement et ouvertement sur nos choix, avec le soutien de notre partenaire.
Si je prends mon exemple, nous avions décidé très tôt avec mon compagnon que nous ne voulions aucune visite à la maternité et à la maison dans le premier mois après la naissance. C’est quelque chose qui a été très difficile à comprendre pour certains de nos proches, mais qui était extrêmement important pour nous, surtout pour moi. Je me connais plutôt bien, et je sais que je suis quelqu’un d’introverti. J’adore être entourée de mes proches et de mes amis, mais je sais que cela me demande beaucoup d’énergie. Après avoir rencontré du monde, il me faut toujours au moins une journée au calme pour me reposer et me retrouver. Cela ne signifie absolument pas que je ne les apprécie pas, ou que je n’apprécie pas le temps passer avec eux, au contraire !
Je savais donc qu’avec la fatigue de l’accouchement et l’arrivée de mon nouveau-né, je voulais me concentrer sur lui, sur nous, sur notre nouvelle famille. Je voulais avoir le temps de me sentir disponible pour ceux qui voulaient nous rendre visite. Et je savais aussi, avec mon petit caractère bien trempé, que si je me sentais débordée j’aurais probablement recours à la colère pour l’exprimer. Je ne souhaitais pas abîmer des relations aimantes juste à cause de ma fatigue ou de mon stress. C’est pourquoi nous avons fait ce choix, pour respecter mon besoin de tranquillité et de calme, et pour prendre soin de nos relations avec les autres.
Parce que nous étions d’accord tous les deux, et parce que nous en avons parlé très tôt à tous nos proches, tout s’est passé selon nos souhaits et je n’ai absolument aucun regret.
Cela n’a pas empêché que certains aient leur mot à dire sur notre « égoïsme » (?) et sur le fait que « moi aussi j’ai le droit de voir le bébé » (on n’a jamais dit qu’on l’interdisait à vie…) ou « moi j’aurais jamais fait comme ça » (oui bah chacun sa vie et ses choix!)… Mais le fait que nous étions au clair avec nous-même fait que nous avons été serein et ferme face aux avis et conseils que nous avons reçus sur le sujet.
Il en va de même pour l’allaitement de notre enfant (qui dure toujours après 20 mois et qui fait beaucoup parler), et beaucoup d’autres choses. Si vous faites le point en amont et décidez d’un commun accord dans le couple de ce que vous souhaitez ou pas, et si vous le communiquez clairement à vos proches, vous éviterez de nombreux conseils non sollicités et de frictions inutiles dans vos relations.
De la même façon, n’hésitez pas à le dire lorsque vous estimez qu’une personne vous stress avec des commentaires inappropriés ou des conseils non sollicités qui vous dérangent.
Je vous invite très vivement à vous faire accompagner par un coach ou un psychologue si vous ressentez le besoin d’avoir du soutien pour faire ce travail. C’est à vous de construire la sécurité émotionnelle dans laquelle vous vous sentirez en paix, et dans laquelle les jugements d’autrui ne vous atteindront plus.
Je pense aussi que si vos proches vous aiment sincèrement, et si vous expliquez vos choix et leurs raisons, vos proches finiront par les respecter par respect et par amour pour vous.
Tous les conseils non sollicités sont-ils malvenus au post-partum?
On pourrait croire que je généralise et que je pense que tous les conseils non sollicités sont forcément malvenus et source de stress pour la jeune maman. Pourtant, ce n’est pas le cas du tout.
Dans sa situation de bouleversements profonds et intenses, la maman peut se sentir totalement débordée, au point même d’avoir parfois du mal à appeler à l’aide.
Je pense que certains conseils peuvent apaiser et aider une jeune mère à trouver ses repères et à se rassurer. Mais pour cela, il faut faire attention à ce que ces conseils respectent à la fois la personne et ses besoins.
En tant que maman, face aux conseils non sollicités, il est important de se rappeler qu’ils viennent souvent d’un désir profond d’aider et d’être utile. Alors même s’il peut vous paraître intrusif, jugeant ou même parfois violent, je vous invite à ne pas forcément y réagir immédiatement et à prendre du recul, dans la mesure du possible.
Lorsque vous n’y parvenez pas, c’est à votre partenaire de vous y aider. En prenant du recul, vous pourrez peut-être voir l’intention cachée derrière ce conseil. Pourquoi la personne a-t-elle ressenti le besoin de partager ce conseil ? Est-ce qu’il m’a été utile ? Est-ce qu’il m’a semblé jugeant ?
Si c’est un conseil utile, c’est parfait ! Remerciez la personne et dites-lui que vous n’hésiterez pas à solliciter vous-même ses conseils si vous en ressentez le besoin à l’avenir.
Si le conseil n’est pas utile, je pense qu’on peut parfois simplement remercier la personne pour son intention sans aller plus loin. Rien ne vous oblige à appliquer le conseil, mais rien ne vous force non plus à blesser une personne qui ne souhaitais que vous aider.
Enfin, si le conseil est jugeant, voire blessant, alors il est important d’exprimer ce ressenti auprès de la personne. Une fois encore, il ne s’agit pas d’entrer en guerre, mais d’exprimer avec calme et bienveillance le ressenti que vous avez : « je me sens jugée quand tu dis cela », « j’ai l’impression que tu me juges et que tu me considères comme incompétente, cela me blesse et me stresse un peu ».
La communication est vraiment la clé. Une communication honnête, ouverte, calme et bienveillante, dont le but est de prendre soin de la relation et de vous-même. Pour cela, il existe de nombreux outils, comme la communication non violente. Souhaitez-vous que je vous en parle plus en détail dans un autre article ?
N’hésitez pas à me partager vos avis et témoignages dans les commentaires.