Les 3 racines invisibles de la culpabilité parentale (et pourquoi ce n’est pas ta faute)
Tu viens de t’asseoir, ton bébé dort enfin, et tu as même réussi à lancer une machine (exploit olympique du jour). Tu pourrais souffler. Mais à la place, une petite voix débarque :
“Tu aurais pu passer plus de temps avec lui. T’as crié un peu fort tout à l’heure, non ? Et ce body en velours, il n’est pas trop chaud ?”
Bienvenue dans l’univers tentaculaire de la culpabilité parentale.
Elle s’infiltre partout : dans les silences, les décisions du quotidien, les moments de doute et même ceux de fierté. C’est insidieux. Presque automatique. Comme si devenir mère venait avec une appli préinstallée qui s’appelle “Culpabilité 24/7”, impossible à désinstaller.
Et pourtant… ce poids que tu portes, ce n’est pas “juste toi”. Il y a des racines profondes, invisibles, mais bien là.
Des trucs qu’on ne voit pas toujours, qu’on traîne souvent sans s’en rendre compte — et qui alimentent cette fichue culpabilité, même quand tu fais déjà de ton mieux (spoiler : tu fais déjà de ton mieux).
Dans cet article, on va démêler ensemble les 3 racines invisibles de la culpabilité parentale.
Pas pour les faire disparaître d’un claquement de doigts (je n’ai pas encore reçu mes pouvoirs magiques), mais pour mettre de la lumière là où il y avait du flou. Parce que comprendre, c’est déjà alléger.
Racine #1 : L’héritage invisible (et bien lourd)
Tu pensais commencer ta vie de mère avec un joli carnet tout neuf ? Raté. En fait, tu débarques avec une valise pleine à craquer de tout ce que tu as vu, vécu, entendu depuis que tu es née. Et sans même t’en rendre compte, tu ouvres cette valise tous les jours.
Il y a ce que ta propre mère faisait ou ne faisait pas. Ce que les femmes autour de toi disaient de la maternité. Ce que tu as lu dans les magazines, ce que tu as vu dans les films où la mère allaite en souriant pendant que la maison sent la brioche et que le bébé ne pleure jamais (on aimerait leur demander sur quel modèle ils se sont basés, franchement).
C’est l’héritage. Le bagage. Le fond de décor.
Et ce décor, il joue dans ta tête, comme une musique de fond que tu n’as pas choisie… mais qui influence tous tes gestes de maman.
Ce que tu portes sans t’en rendre compte
Tu te demandes pourquoi tu te sens nulle quand tu demandes de l’aide ?
Peut-être parce que tu as grandi avec l’idée qu’une “bonne mère” gère tout toute seule, avec abnégation et en souriant.
Tu te sens coupable de ne pas avoir envie de jouer à cache-cache pendant 1h ?
Peut-être parce que, dans ta tête, être une maman présente = être disponible 24h/24.
C’est là, en sourdine, et ça te juge avant même que tu ne réfléchisses.
Anecdote perso (suis-je la seule ?)
Je me souviens d’un jour où j’ai levé un peu la voix. Rien de dramatique. Mais instantanément, j’ai senti cette vague de culpabilité me submerger. Et en creusant un peu (merci les insomnies à 3h du mat), j’ai réalisé que j’étais en train de rejouer un scénario que j’ai connu enfant : “Tu dois toujours être douce, sinon tu es une mauvaise mère.”
Sauf que non. Parfois, on élève la voix. Et élever la voix n’est pas la même chose qu’élever un traumatisme (voilà une nuance qu’on devrait imprimer sur des mugs).
Ce que tu peux faire (au lieu de tout porter)
Commence par repérer une phrase toute faite qui t’habite, du genre :
- “Une bonne mère fait passer ses enfants avant tout.”
- “Je dois profiter de chaque instant, sinon je suis ingrate.”
- “Il faut toujours être patiente.”
Et demande-toi :
➡️ D’où ça vient ?
➡️ Est-ce que j’y crois vraiment, moi, aujourd’hui ?
➡️ Est-ce que ça m’aide ou ça m’écrase ?
Tu peux même écrire une version alternative, genre :
“Une bonne mère se respecte aussi, pour montrer à son enfant comment faire.”
Ça semble tout bête, mais mettre des mots à soi à la place des injonctions héritées, c’est déjà reprendre un bout de pouvoir.
NB : Je ne suis toujours pas à l’aise d’élever la voix, mais maintenant, je sais pourquoi, je sais ce qui provoque cette réaction chez moi : je sais que quand j’élève la voix, c’est parce qu’une de mes limites n’a pas été respectée, et je peux donc adresser le vrai problème au lieu de culpabiliser. Ai-je communiqué clairement ma limite ? Ou ai-je attendu d’être à bout pour exploser ?
Racine #2 : L’illusion du contrôle total
Tu vois cette idée qu’on peut tout gérer si on s’organise bien ? Qu’avec les bons tableaux Excel, les bonnes routines et une dose suffisante de volonté, on peut être une mère épanouie, une professionnelle performante et une partenaire disponible ?
Spoiler : c’est une arnaque. Une jolie arnaque, bien emballée dans un ruban rose pastel, mais une arnaque quand même. Crois-en l’ancienne control freak repentie que je suis !
La croyance (très) répandue : “Je peux tout maîtriser”
C’est logique : avant bébé, tu maîtrisais ta vie au millimètre. Tu organisais ton agenda, tu planifiais tes projets, tu anticipais les imprévus. Tu étais cette meuf efficace, fiable, carrée.
Alors forcément, tu as abordé la maternité avec le même mindset.
Sauf que.
Sauf que le bébé, lui, n’a pas lu ton planning. Ni ton livre sur le sommeil. Ni les conseils du pédiatre. Ni ton script mental du “moi, j’aimerais faire comme ça”.
Et quand la réalité te rappelle que tu ne peux pas tout contrôler — ni les pleurs, ni les nuits, ni les hormones, ni même tes propres émotions parfois — la culpabilité débarque en furie.
“J’ai dû mal faire quelque chose. J’ai pas assez anticipé. J’ai raté un truc.”
Alors qu’en vrai, non. Tu n’as rien raté. Tu vis juste quelque chose de vivant.
Anecdote maison : la check-list qui a explosé
Je me souviens d’un soir où j’avais tout “optimisé” :
– sieste nickel à 16h
– tétée calée
– pyjama prêt
– playlist berceuse, lumière tamisée, tout le package…
À 20h, il a hurlé pendant 12h30.
Et moi ? J’ai pleuré en silence tout en essayant de l’apaiser, en pensant :
“Si même en faisant tout bien, ça ne marche pas, c’est que c’est moi le problème.”
Mais non. Le problème, c’était juste… l’idée que ça devait marcher. Que tout était entre mes mains. Que je pouvais tout “performer”. Mais chaque bébé est un être humain, un individu à part entière, pas un petit robot bien calibré qui réagit de façon prévisible et adéquate (quoique ça veuille dire…) à nos actions ou nos attentes.
Un petit exercice (vraiment) libérateur
Prends une feuille. Trace deux colonnes.
Dans la première :
Ce que je peux contrôler.
(ex : ce que je mange, demander de l’aide, prendre l’air, respirer avant de crier…)
Dans la deuxième :
Ce que je ne peux pas contrôler.
(ex : les pleurs de bébé, la météo, les commentaires de belle-maman, la forme de ta cicatrice de césarienne)
Et relis ça à chaque fois que tu sens la vague de culpabilité monter.
Parce que tu n’es pas responsable de tout. Et tu n’as pas à l’être.
Racine #3 : Le regard des autres (même quand ils ne sont pas là)
Tu es seule avec ton bébé. Il pleure. Tu fais de ton mieux.
Et pourtant, là, dans un coin de ta tête, il y a une audience imaginaire qui t’observe.
Ta mère. Ta voisine. La pédiatre. Le compte Instagram que tu suis. La boulangère (oui, même elle).
Et elles pensent quoi, toutes ces voix ?
“Elle ne sait pas calmer son bébé.”
“Elle aurait dû reprendre le portage.”
“Elle le stimule trop / pas assez / pas comme il faut.”
C’est ça, le regard des autres.
Parfois il est réel (merci les “bons conseils” de Tata Monique).
Parfois il est supposé (bonjour l’auto-jugement permanent).
Mais dans tous les cas, il nourrit la culpabilité comme un engrais bien dosé.
Le piège : se juger à travers des regards qu’on imagine
Tu veux être une “bonne mère”, mais selon quel standard ?
Celui de ta famille ?
Des experts Insta ?
Du pédiatre parfait qui a toujours réponse à tout (et zéro cernes) ?
De cette copine qui semble gérer comme une pro ?
Et du coup, tu ajustes ton comportement, ton instinct, ton rythme… pour coller à ce que tu penses qu’on attend de toi.
Résultat : tu fais des choix à contre-cœur. Tu t’épuises à prouver que tu gères. Et quand ça ne fonctionne pas ? Boum. Culpabilité + 10.
Exemple (certifié vécu) : l’affaire de l’allaitement en mode “priorité bébé”
J’allaite toujours mon fils, et franchement, j’en suis fière. Je l’ai allaité exclusivement pendant ses 6 premiers mois.
Mais à certains moments, cette fierté s’est retrouvée un peu secouée par les regards en coin et les commentaires mal placés.
Tu vois, quand on était invités chez des amis ou qu’on recevait du monde à la maison, je m’isolais dès qu’il avait besoin de téter. Même en plein milieu d’une discussion passionnante ou d’un repas.
Pour moi, c’était évident : mon bébé passe avant la conversation. Point.
Mais visiblement, pas pour tout le monde.
J’ai eu droit à des petites phrases du genre :
“Mais il a encore faim ?”
“Tu vas le rendre accro à toi…”
“Tu peux pas attendre un peu ?”
“Tu sais, nous on a survécu au biberon !”
Et même si je ne montrais rien, ça me piquait.
Je savais que je faisais ce qu’il y avait de mieux pour nous deux. Mais le simple fait de devoir m’expliquer, ou sentir que je dérangeais, faisait naître un soupçon de culpabilité.
C’est dingue comme le regard (ou l’incompréhension) des autres peut venir t’ébranler, même quand tu es au clair avec tes choix.
Un outil mental pour désactiver le radar à jugements
Propose-toi un mantra d’auto-défense mentale. Un truc court, simple, que tu peux te répéter quand tu sens que tu culpabilises à cause d’un regard (réel ou non).
Exemples :
- “Je fais de mon mieux, et c’est suffisant.”
- “Ils ne vivent pas ma réalité.”
- “Je suis la seule experte de mon bébé.”
- “Je ne suis pas parfaite. Je suis humaine. Et aimante.”
Tu peux même l’écrire sur un post-it. Ou le glisser dans ta coque de téléphone.
C’est simple, mais ça crée une micro-distance entre toi et le poison du regard extérieur.
Et maintenant, on fait quoi avec tout ça ?
Tu l’as vu : la culpabilité parentale, ce n’est pas juste une émotion qui vient te titiller quand tu as oublié le liniment.
C’est une mécanique bien huilée, nourrie par trois racines souvent invisibles mais profondément ancrées :
- ce que tu as hérité (sans le choisir),
- ce que tu veux maîtriser (sans le pouvoir),
- et ce que tu crois que les autres attendent de toi (souvent sans qu’ils ne disent rien).
Mais tu sais quoi ? Tu n’es pas obligée de continuer à la subir.
Tu peux commencer à mettre de la conscience, du recul et un peu de douceur sur tout ça.
Tu peux choisir, petit à petit, de désactiver les automatismes, de t’alléger, de respirer.
Et non, ce n’est pas “bête”.
C’est simple. Et souvent, les choses simples sont les plus puissantes.
Comme te dire, aujourd’hui :
“Je fais de mon mieux. Et c’est déjà énorme.”
Et toi ?
Quelle est la racine de ta culpabilité qui revient le plus souvent ?
Celle qui t’attrape en douce, même quand tout va à peu près bien ?
Tu peux la nommer en commentaire, ou juste venir me dire que cet article t’a parlé.
Parce que tu n’es pas seule ♥